Qu’est ce que je pourrais dire de mon passé ou de mon présent qui en vaille la peine
Je suis juste là maintenant.
J’ai souhaité conduire ma voiture vite ou au moins être ce genre de personne qui pourrait le faire
J’ai collectionné compulsivement les cailloux pour éviter le silence
Je suis juste là maintenant.
J’ai encré dans mon corps la personne que je suis et celle que j’aurais voulu être
Sans jamais réussir à faire coïncider les deux
J’ai cherché à rajouter sa clé en espérant qu’il viendrait me la déposer
Je me suis cogné à des murs de plus en plus proches et épais
J’ai oublié de chercher une porte
J’ai pensé au cerisier et à la robe blanche qui se sont éloignés inexorablement
Avec mon grand trou au milieu du corps
Je gloutonnais du mépris et je suis toujours tellement en colère
J’ai mis du vent dans mon savoir-vivre
J’ai mis de la force dans mes veines
J’ai mis de la liberté dans mes poings
J’ai mis des larmes de crocodile dans mon cœur
Comme tout le monde j’ai rêvé des fjords d’Islande, de cet ébéniste
J’ai laissé ces images s’éloigner parce que je pensais, comme tout le monde, ne pas les mériter
J’ai trainé ma putain d’ancre à droite de plus en plus lourde au fil des ans
Depuis longtemps, la boussole avait l’arme à gauche
Plus d’hortensias bleus, à genoux je relève mon regard vers le ciel
Le combat contre l’effondrement.
Maintenant je suis juste là.
Et toi tu me demandes maintenant pourquoi je n’ai pas fait ça mieux
Je te dirais
Qu’y a-t’il que je puisse retirer de mon passé ou de mon futur qui en vaille la peine
J’ai pris le temps de trop réfléchir, de perdre espoir, de pleurer mon enfant mort
De porter les branches de cerisiers et les papillons d’or et la clé qui dérangeait
En espérant quand même qu’il la récupère
J’ai joué ma vie dans des gargotes de pirates à Java
Je les ai tous essayé, j’ai pleurer pour que ça vienne à moi
Les murs toujours, juste au bout de mes ongles, j’ai arrêté de gratter
J’ai accepté qu’ils ne soient jamais là.
Six pieds sous terre
Maintenant je suis juste là.
J’ai l’éternité pour apprendre à aimer l’humanité à pardonner la déchéance
A me nourrir des anges
A en faire ma famille
A me dire que l’art qui au fond de mon malheur a été là peut servir à d’autre
Parce que moi maintenant je suis juste là, je n’ai plus besoin de lui ni de rien.
Six pieds sous terre mon gars
Et juste au paradis.
Pour Natacha V.